Eglise St Pierre de Bagneux

L’ancienne église St Pierre

L’église dans laquelle vous entrez n’est pas la première église de Bagneux. Aux siècles antérieurs à notre époque, il y avait deux foyers principaux d’habitat dans le territoire où elle se trouve : le
Pont-Fouchard, hameau situé à proximité du pont éponyme, qui était rattaché au spirituel à l’abbaye, puis à la paroisse de St Florent. Et le village de Bagneux, près du château et dominant le Thouet et les
prairies du Marais du Roy situées de l’autre côté de la rivière, qui possédait sa propre église. Cette petite église, construite dans la première moitié du XIIIe siècle – et qui existe toujours,
malheureusement défigurée –, dépendait d’un prieuré attenant, qui relevait de l’Abbaye de la Trinité de Mauléon, en Poitou. Le prieur, chanoine régulier de St Augustin, avait le titre et les fonctions de
prieur-curé de Bagneux. Le dernier d’entre eux, Jean-Marie Allard, fut, après avoir renié le serment constitutionnel, arrêté puis jugé et exécuté à Paris le jour de Noël 1793 (5 nivôse an II). L’existence de la paroisse disparut alors avec lui pendant près de soixante ans…

L’origine de l’église actuelle

Cependant, le percement du grand axe de Saumur à la fin du XVIIIe siècle, et la construction de l’actuel pont Fouchard, ainsi que la proximité de la ville, allaient faciliter grandement l’expansion de Bagneux, où des Saumurois aisés vinrent édifier leur résidence . D’une centaine d’habitants à l’origine, on passe à 600 en 1850, et plus de mille en 1865 ! Un curé, l’abbé Ambroise Bruneau, est nommé par l’évêque d’Angers en 1850 et l’on s’empresse de restaurer et d’agrandir la petite église des bords du Thouet. Las ! Malgré ces transformations, celle-ci, comme le cimetière attenant, se révèle vite très insuffisante… Le maire, M. Ezéchiel Demarest, et le curé réfléchissent à l’opportunité de déplacer le centre de gravité de la commune vers la grande voie de communication, au long de laquelle de nombreuses maisons s’alignent déjà, et la décision est prise de construire une nouvelle église et une mairie-école. Ce projet sera réalisé entre 1867 et 1870 par l’architecte de la ville de Saumur, Charles Joly-Leterme, sur un devis de 60 000 francs pour l’église, dont 10% sont apportés par l’évêque, Mgr Angebault. On inaugure la nouvelle église le 12 janvier 1868.

l’extérieur de l’église actuelle

C’est cette église que vous visitez aujourd’hui… Scrupuleux observateur de son environnement patrimonial, Joly-Leterme s’inspire d’édifices existants – il en a restauré de nombreux – pour donner une âme et une unité à son projet. Il choisit le matériau de construction traditionnel des églises angevines : la belle pierre de tuffeau. La façade, avec ses contreforts saillant fortement sur le plan de l’édifice et son porche bien abrité n’est pas sans évoquer N.-D. de Nantilly, à Saumur, et de nombreuses églises angevines des XIIe et XIIIe siècles. De même, les porches nord et sud ont été édifiés dans le style néo-roman. Au-dessus de l’entrée, une rangée de modillons fait penser, en plus modeste, à ceux de la belle église de Brion-en-Vallée. Le pourtour, avec ses ouvertures en plein cintre et leurs arcs surhaussés, rappelle le narthex de l’ancienne abbaye de St Florent, modèle de gothique angevin du XIIIe siècle. Le clocher, situé au-dessus du porche, est couvert d’ardoises, et quatre petits clochetons très effilés figurent les quatre évangélistes autour du Christ. Le plan de cette église, avec transept, est celui d’une croix latine, assez correctement orientée (chevet vers l’est-sud-est). La sacristie est accolé au sud du chevet. Comme celle qu’elle a remplacée, cette église est dédiée à st Pierre, le premier apôtre.

L’intérieur de l’église _

À l’intérieur, l’ensemble frappe par son élégance.

La nef unique est bien éclairée, notamment le chœur, qui a été pourvu de cinq fenêtres de bonnes dimensions. Les fonts baptismaux et l’autel majeur ainsi que les autels secondaires et la chaire sont traités dans le même style néo-gothique que l’ensemble de l’édifice.

Le nouvel autel, “face au peuple”, a été réalisé en 2004 à la demande des paroissiens et du curé Bernard Doneau, par les Compagnons du Devoir, installé en 2006 et consacré le 29 octobre de la même année par Mgr Bruguès, évêque d’Angers. Il rappelle, par ses proportions réduites et sa facture sobre, les autels des églises primitives.

Les voutes

Utilisant aussi la pierre de tuffeau, les douze voûtains du chœur (autant que d’apôtres et peut-être inspirés par la salle capitulaire du prieuré grandmontain de Breuil-Bellay à Cizay-la-Madeleine), qui se réunissent à leur clef autour de la barque de Pierre, les voûtes de la nef et des transepts, légèrement bombées, et les colonnes engagées, avec leurs chapiteaux sculptés,qui supportent cet ensemble, illustrent bien le style gothique angevin dit “Plantagenêt”.

Les vitraux

Bien qu’ils soient postérieurs au milieu du XIXe siècle, comme tous ceux des édifices religieux du Saumurois, les vitraux de cette église présentent un véritable intérêt esthétique. Dans l’acception dite des “vitraux historiés”, ce sont tous, à une exception près, des œuvres de peintres et de verriers angevins.

  • Éclairé majestueusement par le soleil du matin, le vitrail central (l’exception !) est contemporain de la construction de l’église (1868) ; peint par Claudius Lavergne, il a été offert par le maire de cette époque, M. Ezéchiel Demarest. Il représente St Pierre, patron de la paroisse, pourvu de la clef du Royaume des cieux. Sa facture est caractéristique de cette époque, qui a connu la renaissance de l’art du vitrail, promue par une floraison de verriers, notamment à Paris et, surtout, dans l’ouest de la France.
  • Les deux vitraux qui l’entourent sont postérieurs d’une soixantaine d’années et et se rattachent au style “art déco”. A gauche, signée de R. Desjardins, d’Angers (1926), est représentée la “Conversion de St Paul” (Saul) sur le chemin de Damas.
    Le vitrail de droite, du même auteur, donné par la famille Cailleau, fondatrice de l’entreprise de capsulerie (pour l’élaboration des vins mousseux) de Bagneux, représente la Vierge Marie couronnée de douze étoiles, portant l’Enfant Jésus et enlevée au Ciel par les anges,
    au-dessus d’un paysage qui peut très bien être qualifié de ligérien. Le Saint Esprit, sous la forme d’une colombe, préside à la scène.
  • Le vitrail du transept nord, de 1929, également de Desjardins, représente Ste Thérèse de l’Enfant Jésus (canonisée en 1925) ). Il est aussi le vitrail des trépassés et représente son donateur, le curé de l’époque, l’abbé André Pénot – qui fut curé de Bagneux durant quarante ans ! –, accompagnant au cimetière l’un de ses chers défunts. . .
  • De style déjà moderne quoique encore “figuratif”, celui du transept sud, le plus récent de tous (1937), est une œuvre de Maurice Bordereau, d’Angers, autre célèbre verrier angevin ; il représente St Louis rendant la justice sous le chêne du château de Vincennes ; l’ecclésiastique qui se tient derrière lui pourrait bien être son compagnon et garde des sceaux, le Saumurois Gilles de Tyr. Le donjon du deuxième plan (du XVe siècle) est évidemment anachronique… La représentation de St André, avec sa croix en “X”, indique que l’œuvre fut offerte par ce même curé.
  • En redescendant la nef, on trouve quatre vitraux réalisés du milieu à la fin des années vingt. À gauche (sud), celui dédié aux morts de la guerre 1914-1918, , de Georges Merklen, est le seul en Anjou à commémorer les morts de la Grande Guerre. Puis le vitrail de St Joseph, à la mémoire du chanoine Mathurin Pénot, ancien curé de St Joseph d’Angers, et l’oncle du curé André Pénot. À droite, le vitrail de Ste Jeanne d’Arc, canonisée en 1920, représente l’humble bergère de Domremy et, au-dessus, le chef d’armée revêtu de son armure, vainqueur des Anglais et enlevée au Ciel.
  • Le dernier vitrail – encore un don du curé Pénot – glorifie St Maur, l’abbé des bords de Loire…

Le mobilier et la décoration

Deux confessionnaux et plusieurs statues contribuent encore à l’ornementation de cette église. De gauche à droite, en regardant vers le chevet, on trouve

  • une représentation de St Joseph portant l’Enfant Jésus dans ses bras avec l’invitation : “Ite ad Joseph” : “Allez à Joseph” ;
  • puis, de chaque côté du chœur, les représentations du Sacré Cœur et de la Vierge de Lourdes.
  • Enfin, au-dessus de l’autel du transept sud, une Vierge à l’Enfant avec l’inscription : “Ave Maria”. Le peintre-décorateur angevin René Rabault a peint en 1932, derrière les autels et les statues des transepts, deux grandes toiles marouflées qui les mettent bien en valeur.
  • La Sainte Table, bel ouvrage de fer forgé et cuivre poli, a été offerte, comme l’autel de la Vierge par la famille Delandes, bienfaitrice de la paroisse à la fin du XIXe siècle.

Le clocher

Pourvu, à sa construction, d’une seule “vieille” cloche (sans doute récupérée de l’ancienne église et, de surcroît, fêlée), le clocher a été doté en 1902, par l’abbé Joseph Combes, d’un très beau carillon de trois cloches neuves, financées à l’époque par un emprunt et des dons, et qui sonnent le sol, le la et le si.

La séparation de l’Église et de l’État

Ce même curé eut à vivre, quelques années plus tard, la période difficile de la séparation de l’Église et de l’État, suivie de l’inventaire des biens de la paroisse, prescrit par la loi. Cet épisode fut assez violent à Bagneux et une petite plaque de marbre blanc, scellée dans l’entrée de la sacristie, le rappelle par la date gravée du 7 mars 1906.

La paroisse aujourd’hui

Cette église, encore bien vivante grâce à l’action dévouée de fidèles paroissiens qui l’animent, est aujourd’hui rattachée (depuis septembre 2013) à la paroisse Ste Jeanne Delanoue, comme les quatre anciennes paroisses de Notre-Dame de Nantilly, St Hilaire-St Florent, Rou-Marson et Verrie. Elle est actuellement placée sous la responsabilité de l’abbé Laurent Blourdier, curé de cet ensemble de clochers. Puisse le Seigneur donner encore longtemps à cette communauté le souffle qui fait vivre, pour le bonheur et la sanctification des habitants de Bagneux !

Octobre 2007 (rév. 2019).